17/12/2012

La gestion de l'eau, un défi majeur pour l'Afrique

Les
villes africaines cultivent le paradoxe. Alors qu'elles enregistrent la
croissance urbaine la plus élevée au monde (3,9 % par an), elles
croulent sous un déficit inquiétant en matière de gestion de l'eau. Une
situation qui inquiète des organismes internationaux qui tirent la
sonnette d'alarme pour alerter les décideurs sur la nécessité de trouver
des voies et moyens d'y faire face. Pour la Banque mondiale, la gestion
de l'eau en milieu urbain est devenue un des défis majeurs pour les
États africains. L'Afrique "doit adopter une approche plus intégrée
pour relever les défis complexes que pose la gestion des réseaux
d'alimentation en eau des villes du continent, qui se peuplent à vitesse
grand V, et les rendre résilientes et durablement viables en la
matière"
, a constaté l'institution internationale dans un rapport
présenté lors du sommet Africités, tenu à Dakar. Selon le directeur
sectoriel de la Banque pour le développement et les services urbains
dans la région Afrique, Alexander Bakalian, "il faut absolument
relever le défi de la gestion de l'eau en milieu urbain pour libérer le
potentiel économique des villes africaines et faire en sorte que les
résidents des villes aient une vie meilleure."
Pour le responsable, cela passe par la compréhension des "liens
qui unissent l'eau aux autres secteurs et développer des modes de
planification et d'exécution de projets novateurs. Certaines villes du
continent commencent à intégrer la planification des ressources en eau à
leur stratégie de développement."

Des prévisions alarmantes Selon
le rapport de la Banque Mondiale intitulé "Le futur de l'eau dans les
villes africaines : pourquoi gaspiller l'eau ?", les systèmes existants
de gestion des ressources en eau sont insuffisants pour faire face à la
demande qu'entraîne la croissance urbaine. Le rapport souligne en effet
que des études prévoient que dans les 25 prochaines années, la demande
en eau sera quatre fois plus importante qu'aujourd'hui. Environ 320
millions d'Africains vivent en milieu urbain ou périurbain, et ce nombre
devrait s’élever à plus de 650 millions d'ici 2030. "Conjuguées, la
croissance démographique et la hausse des besoins en eau – réseaux
municipaux, industrie, développement écologique –  vont exercer de
fortes pressions sur les ressources en eau, déjà fragiles"
, prévient la BM dans son rapport. En sonnant l’alarme, la Banque  espère influer sur "la
manière dont les responsables des politiques envisagent la gestion, la
planification et la conception de projets de réseaux d'alimentation en
eau en milieu urbain."

Tirer profit des expériences en matière de gestion – S'étant appuyée sur "les enseignements tirés de l'expérience de 31 villes d'Afrique et d'ailleurs", l'étude souligne que "si
les responsables des politiques urbaines adoptent des approches de
gestion intégrée des ressources en eau en milieu urbain – IUWM, ils
pourront relever les défis que pose la concurrence accrue pour l'eau
avec les consommateurs en amont, améliorer la planification urbaine, et
dans le contexte du changement climatique, acquérir des capacités de
résilience dans un avenir incertain en comptant sur une plus grande
diversité des sources d'eau."

Pour la BM, il ne fait néanmoins
aucun doute que l'évolution des villes africaines conduira forcément à
un changement de politiques dans la gestion de l'eau pour faire face à
la problématique de la distribution. "L'infrastructure de gestion de
l'eau en milieu urbain sera différente demain. Elle tiendra compte de la
rareté et de la qualité de l'eau, et aura une vision entièrement
différente de la production et de la consommation d'énergie"
, explique Julia Bucknall, directrice sectorielle, unité de l'eau. "Les
villes africaines en développement ont l'occasion d'être bâties dès le
départ sur ce mode de gestion intégrée. Cet effort nécessite un sens de
l'engagement sans faille, mais les dirigeants africains sont nombreux à
comprendre les enjeux de cette nouvelle approche. Nous appuyons leur
engagement avec enthousiasme"
, a-t-elle ajouté.

Wahany Johnson Sambou, Le Soleil (Dakar) – AllAfrica 08-12-2012